Forte concentration de coronavirus dans les eaux usées, les égoutiers inquiets pour leur santé

 

Une forte concentration de Covid-19 a été détectée dans les eaux usées de Paris. Sans preuve du contraire, ces traces sont considérées comme étant « potentiellement infectieuses ». Les égoutiers s’inquiètent pour leur santé, tandis qu’ils sont déjà confrontés à un métier à risques.

Selon les résultats des derniers prélèvements effectués par Eau de Paris, l’organisme en charge des réseaux d’assainissement et que France Bleu Paris s’est procuré, il n’y a plus aucune trace détectable de Covid-19 dans l’eau non-potable de la capitale. En revanche, l’inquiétude des égoutiers de Paris demeure en ce qui concerne les eaux usées.
Ces eaux usées que l’on retrouve dans nos égouts et qui proviennent directement de nos salles de bain, de nos toilettes ou encore de nos cuisines ont présenté entre mars et avril une importante concentration de virus. Les égoutiers de Paris ont donc déposé un préavis de grève, rentré en vigueur le 11 mai, renouvelable jusqu’à la fin du mois.

« Le principe de précaution doit s’appliquer »


Selon nos informations, il a eu -pendant le pic de l’épidémie- une forte concentration de coronavirus dans les échantillons d’eaux usées analysés par et pour Eau de Paris, l’organisme en charge du réseau d’assainissement. Il ne s’agit pas de traces infimes comme ce fut le cas pour l’eau non-potable, mais de particules virales intègres et donc potentiellement infectieuses.

« Le virus est très présent, on ne sait pas si c’est infectieux mais on estime qu’à partir du moment où il y a un doute, le principe de précaution doit s’appliquer pour protéger les agents », estime Julien Devaux, délégué CGT FTDNEEA. Il regrette que les égoutiers soient de retour au travail sans que leurs conditions n’aient vraiment évoluées. « Les égoutiers continuent de travailler dans le réseaux d’assainissement comme si de rien n’était, sans que leurs protections soient adaptées ». « Ce qu’on demande c’est un masque ventilé qui prenne l’intégralité du visage », poursuit-il, insistant sur les risques actuels de projections de particules du virus dans les yeux et donc les muqueuses des égoutiers.

Présent mais pas forcément actif


« On comprend leurs inquiétudes, les égouts sont un milieu extrêmement hostile, égoutier est un métier dangereux », reconnait Célia Blauel, adjointe à la mairie de Paris et présidente de l’organisme Eau de Paris. « Mais leurs tenues sont à la pointe », insiste l’élue. Selon elle les équipements des égoutiers ont évolué lors des 10 dernières années pour être « le plus efficace et le plus opérationnel possible ». « Ils ont des bottes, des combinaisons, des visières pour limiter le risque microbiologique », ajoute-t-elle.

La ville de Paris a toutefois commandé de nouvelles lunettes de protection dont la livraison est prévue début juin. Elle reconnait que le virus est présent mais rappelle que « rien ne prouve qu’il est actif ». Selon Célia Blauel, les résultats des échantillons « c’est une preuve de la présence, rien de plus ».

Une étude a toutefois été lancée pour identifier les risques. Les prélèvements dans les égouts vont donc se poursuivre. « L’idée c’est d’avoir un suivi épidémiologique, de voir quelle est la présence, quel est le taux du virus dans les égouts, et de surveiller si nous avons des cas qui se développent chez nos agents de façon à corréler tout cela de manière scientifique ». Elle temporise toutefois : « Au moment du pic épidémique, personne ou quasiment personne n’est descendu dans les égouts ». Une quarantaine d’agents sur 300 étaient en effet mobilisés pendant le confinement.

Le coronavirus, un risque de plus


Pour l’heure, ces résultats font écho à plusieurs études -reprises notamment dans une note de l’OMS- qui ont démontré la présence du virus dans les selles des patients. L’OMS précise toutefois qu’il n’y a pas eu, à ce jour, de cas de transmission par ce biais mais insiste sur « l’importance des précautions à prendre et de la désinfection des eaux ».

Cette potentialité d’infection vient donc s’ajouter, pour les égoutiers, aux risques qu’ils connaissent déjà, liés aux gaz toxiques et nocifs présents dans les égouts et qui amputent considérablement leur espérance de vie connue pour être de 17 ans inférieure à la population française, selon les travaux réalisés en 2010 par l’Inserm et un rapport datant de 2016 de l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

Les rats sont-ils porteurs ?


La CGT FTDNEEA a par ailleurs réclamé la mise en place d’une campagne spécifique de prélèvements et de tests sur la population de rats en égouts ainsi que sur les boues. « Avec une population estimée à 3 millions sur Paris, les rats sont des mammifères qui peuvent déjà porter le virus de l’hépatite E. Convenons que s’ils étaient porteurs du coronavirus et potentiellement contagieux pour l’homme, cette donnée pourrait avoir une incidence extrêmement importante sur la gestion de l’épidémie et bien au-delà de Paris », indique le syndicat dans un document communiqué aux élus.

A ce sujet l’Anses se veut rassurante, après la contamination au coronavirus d’animaux, dont un chat, ces derniers jours, elle assure dans un communiqué « qu’il n’existe actuellement aucune preuve scientifique quant à la transmission du SARS-CoV-2 d’un animal domestique infecté à l’Homme ».

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