Monsieur le Premier Ministre,
Conformément à nos échanges, la CGT a présenté son analyse et ses propositions en matière de réforme des retraites lors de la première réunion de la conférence de financement, le 18 février dernier. Elle était accompagnée à cette occasion d’un économiste indépendant.
Comme nous avions eu l’occasion de vous le dire, pour la CGT, une véritable démocratie sociale passe par un débat démocratique et contradictoire. Nous regrettons dès lors qu’au cours de cette réunion et malgré l’importance de ces questions, aucun des deux ministres en charge de ce projet, n’aient assisté à ce débat pourtant essentiel me semble-t-il.
À cette occasion, ce sont deux diaporamas qui ont été présentés et commentés. Le premier portait sur le soi-disant déficit de 12 milliards du régime général évoqué par le gouvernement lors de plusieurs de ses rapports sur la base d’une interprétation des travaux du COR. Michaël Zemmour, Maitre de Conférences en Économie à l’Université Paris Panthéon Sorbonne, économiste reconnu sur les questions de financement de la protection sociale, a fait la démonstration que les chiffres fournis par le gouvernement se fondaient sur des hypothèses extrêmes et très partisanes afin de dramatiser une situation qui ne l’est pas. Les 12 milliards de déficit ne représentent en effet que 3% des recettes annuelles du système des retraites. La situation financière des retraites met surtout en lumière la responsabilité de votre gouvernement, et des précédents, dans l’assèchement des recettes de la sécurité sociale au travers de choix politiques budgétaires.
Le second présentait les nombreuses propositions de la CGT et leurs possibles financements. Parmi ces propositions, figurent notamment la prise en compte des années d’étude dans le calcul de l’âge de départ, la reconnaissance de la pénibilité au travers de nouveaux critères et la possibilité de départs anticipés avant 60 ans, âge légal que nous revendiquons. Celui-ci s’appuie essentiellement sur le paiement du travail au travers un salaire socialisé qui est la base de notre système de sécurité sociale basé sur la solidarité.
Par ces interventions, la CGT a fait la démonstration qu’il est possible d’améliorer notre système actuel de retraites en réduisant voire supprimant les inégalités qui se sont accentuées suite aux différentes réformes adoptées par les gouvernements. Notre projet permet également la prise en compte des réalités du monde du travail d’aujourd’hui avec l’émergence de travailleurs et travailleuses souvent jeunes sans contrats de travail et avec une couverture sociale très réduite. Nos propositions s’appuient prioritairement sur une meilleure répartition des richesses entre le capital et le travail. Cela passe en priorité par l’augmentation des salaires dans le secteur public comme dans le privé, une remise en cause des nombreuses exonérations de cotisations sociales patronales …
Cela passe également par la mise en place immédiate de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, une des priorités affichées du quinquennat de M. MACRON et pourtant toujours sans résultat concret à ce jour.
Notre projet est juste et simple contrairement à la réforme présentée par votre gouvernement qui, au fil des mois, n’a pas convaincu la majorité des citoyens de ce pays. Au moment où ce texte est en débat à l’Assemblée Nationale, de nombreuses questions demeurent sans réponse et celles-ci sont renvoyées à la publication de décrets ou d’ordonnances a posteriori.
Beaucoup de parlementaires s’interrogent et nous interrogent, par exemple sur cette conférence de financement dont les conclusions et vos arbitrages ne seront connus qu’après une possible adoption du projet de loi par le parlement.
Nous pensons qu’il est encore temps de valider le bien fondé de nos arguments basé sur la reconnaissance du travail, de son juste de paiement au travers d’un salaire socialisé et de renoncer à votre projet de réforme.
Nous attendons comme évoqué lors de nos échanges et dans l’esprit que nous donnons à cette conférence de financement, vos arbitrages dans des délais les plus brefs possibles.
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de mes salutations distinguées.
Philippe MARTINEZ
Secrétaire général de la CGT